Comment les prix du pétrole vont-ils évoluer ?

INSTITUT FRANÇAIS DU PETROLE

François Lescaroux, économiste

« Tout est possible, au sens où, à partir d’un postulat de départ clairement dentifié – depuis cinq ans, l’offre en pétrole est très insuffisante pour répondre aux besoins -, deux scénarios opposés se dégagent. Tous deux s’articulent autour de la capacité de résistance des pays émergents à la récession qui menace l’économie américaine. Si ces pays maintiennent leur trajectoire dynamique, ils continueront à être gourmands en hydrocarbures et le prix du baril ira alors s’installer entre 80 et 90 dollars. En revanche, si ces pays souffrent, on pourrait voir le brut redescendre vers 60 dollars. Que ce soit l’un ou l’autre, ces deux scénarios n’ont rien de réjouissant. En attendant, on doit constater la faible réaction des consommateurs à la flambée du baril, largement amortie, comme en France, par un système de taxes. »

PRIM’ALTERNATIVE, SOCIETE DE GESTION DES FUTURES

Benjamin Louvet, directeur général délégué

« Il y a encore trois mois, les marchés à terme anticipaient un baril du pétrole à 100 dollars à horizon de décembre 2008. La situation a profondément changé, surtout depuis deux semaines. Aujourd’hui, le marché des futures anticipe 87 dollars le baril en mars 2008 et 85 dollars en décembre. Les prix ont donc déjà nettement baissé, ce qui s’explique par les craintes de récession américaine. Les Etats-Unis sont le plus gros consommateur de pétrole au monde et une récession outre-Atlantique ne peut pas être sans effet sur les prix de l’énergie. Des marges de correction existent donc encore. Nous pensons ainsi qu’une baisse du prix de l’énergie jusqu’à 75 dolars dans les semaines à venir est possible. Toutefois, l’Opep étant déterminée à ne pas laisser les prix glisser et le niveau du dollars constituant un autre facteur de soutien, ces niveaux devraient constituer un solide support. »

MORGAN STANLEY

Eric Chaney, chef économiste Europe

« Le marché du pétrole devrait continuer à se détendre avec un plancher autour de 80 dollars le baril. Pour deux raisons : bien su(il faut corriger)r, à cause du ralentissement économique mondial, mais aussi d’un effet prix. En dix ans, on est passé de 10 à 100 dollars le baril, et les économies des pays de l’OCDE ont réagi à cette envolée des prix en limitant leur consommation, qui est au même niveau qu’en 2004. La hausse des prix a donc limité la demande. Mais l’Opep et en particulier l’Arabie Saoudite ne laissera pas les prix tomber trop bas. Si la demande baisse, les Saoudiens réduiront leur production. Désormais, tout se décide à Ryad, les majors sont devenus des acteurs marginaux et l’essentiel de la production est aux mains de compagnies qui dépendent des gouvernements. »

Propos recueillis par Frédéric de Monicault et Carole Papazian

« LE FIGARO », Economie, janvier 2008